Le Nombre d’or

Le nombre d’or fait partie de ces signes ésotériques auxquels l’on confère un pouvoir occulte, magique, divin depuis sa découverte.

N’importe quel pilier de comptoir d’un café ésotérique vous le dira : “Le nombre d’Or est PARTOUT !! PARTOUT vous dis-je !!!”. Et après moults recherches et contradictions, je ne peux que lui donner raison.

Héritage direct des pythagoriciens, il revêt aussi dans mon cas d’un héritage plus personnel, celui de mon père, dont le nombre d’or était un sujet d’études permanent.

Le nombre d’or, Phi de son petit nom, est aussi protéiforme et se retrouve dans bien des domaines opératifs au-delà de sa forme intrinsèquement spéculative. Mais avant d’aller goûter aux différentes saveurs de Phi, commençons par parler mathématiques.

Qu’est-ce qu’un nombre ? C’est avant tout un objet mathématique opératif, permettant de dénommer des ensembles en les quantifiant. Le besoin de précision dans le calcul a fait évoluer les nombres entiers pour comptabiliser les infinités d’espace entre chacun d’eux, créant les nombres réels. Au sein de ces réels se trouvent des ensembles mathématiques complexes.

Le nombre d’or fait partie des nombres réels, car entre deux entiers. Il est irrationnel car n’étant pas la fraction de nombres entiers, mais n’est pas transcendant car il peut s’exprimer par une relation simple, à savoir un polynome du second degré.

Il est par contre un très fort candidat pour être un nombre univers. A savoir un nombre dont les décimales se calculent à l’infini sans se répéter. Alors seulement dans ce cas nous pouvons retrouver toute série de chiffres imaginable cachée quelque part dans cette suite qui n’est pas à notre portée. Une bibliothèque. Une somme de toutes les connaissances codées dans un seul nombre.

Mais qu’est-ce donc que ce fameux nombre d’or censé être partout ?

Le mathématicien Paul Bruckman en a fait la définition la plus poétique :

Le nombre d’or est un sacré numéro ;
Prends sont inverse (vas-y c’est rigolo),
Et tu le retrouves idem diminué de un
Histoire de voir, maintenant ajoute-lui un
Et tu le retrouves idem, mais élevé au carré.

paul bruckman

Traduisons en terme mathématiques :

\[ {1 \over x} = {x – 1} \] \[ {x + 1} = {x^2} \]

De cette équation du second degré nous pouvons en tirer deux possibilités de réponses

\[x = {1 \pm \sqrt{5} \over 2}\]

Les nombres négatifs étant peu utiles en géométrie, le résultat positif sera celui qui restera  dans l’histoire sous le nom de Φ, le négatif sera Φ ( ou Φ’).

Euclide est certainement celui qui en -300 a le plus formalisé Φ. En effet ce nombre fut trouvé durant l’étude de la construction du pentagone et des solides dits platoniciens.

Il le définissait par un rapport de proportions en extrême et moyenne raison, le rapport a/b entre deux longueurs a et b telles que le rapport de la somme a + b des deux longueurs sur la plus grande (a) soit égal à celui de la plus grande (a) sur la plus petite (b), ce qui s’écrit :

\[{{a + b} \over a} = {a \over b}\]

D’un point de vue géométrique, considérons un triangle isocèle. Si le rapport des côtés à la base est égal au nombre d’or, alors ce triangle est appelé triangle d’or. Ces angles à la base valent 72° et l’angle au sommet vaut 36°

Divisons une longueur selon la proportion dorée et relions le point obtenu à la pointe opposée du triangle. Le triangle est divisé en deux. L’un des triangles est à nouveau un triangle d’or. L’autre triangle est un triangle isocèle avec des angles de 36° à la base et un angle de 72° au sommet. On l’appellera triangle d’argent ou gnomon d’or. La proportion de ses longueurs à la base n’est plus le nombre d’or mais 1/ Φ et donc comme on l’a vu, Φ – 1, ce qui vaut… Φ’

Le gnomon étant le bâton qui permet de visualiser l’ombre du soleil, le gnomon d’or permet de visualiser l’inverse de Φ grâce à Φ.

Superposons deux gnomons d’or et ajoutons un petit triangle d’or et nous avons une étoile à cinq branches.

Ajoutons à un triangle d’or deux gnomons d’or à ses côtés et nous obtenons un pentagone. Si l’on utilise ces pentagones pour former un volume on obtient alors un dodécagone, le solide platonicien représentant l’univers, la voûte céleste. Le dodécagone ayant 12 faces, nous comprenons alors le rapport entre le nombre d’or et la corde à 12 nœuds.

Le nombre d’or a donc un rapport très étroit avec Pythagore, et ainsi avec notre école, nos pensées, nos secrets. Le nombre d’or doit donc faire partie de l’art du trait.

Utilisé comme outil, il a servi dans les arts et notamment en architecture. Considéré comme divin, toute construction faisant intervenir le nombre d’or est forcément belle. L’on peut arguer que la beauté est relative mais la création en elle-même, n’est-elle pas belle indépendamment de qui la regarde ? Les pyramides et la façade du Parthenon sont dites comme utilisant le nombre d’Or. La Joconde elle-même serait aux proportions dorées. C’est d’ailleurs Leonard de vinci lui-même qui a qualifié ce nombre de divin.

Qui peut arguer que ces œuvres ne poussent pas à un sentiment de beauté, de majesté ? Après tout, rappelons-nous que la beauté est une de nos colonnes.

Et je trouve le nombre d’or intrinsèquement beau, non seulement dans ce qu’il représente comme nombre clé de l’univers, mais dans les subtilités de ses équations, dans sa récursivité.

De même, l’évolution des mathématiques a amené une autre clé de compréhension de Φ. La suite de Fibonacci fait intervenir le nombre d’or.

Rappelons ici la suite de Fibonacci. Leonardo de Pisa, dit Fibonacci, a écrit le Liber Abaci, le livre de calcul expliquant comment calculer avec les nombres dits arabes à l’époque de la transition depuis les chiffres romains. Un des exercices du livre expliquait l’évolution du nombre de lapins, chaque nombre de la suite est la somme des deux précédents.

0 puis 1 puis 1 puis 2, 3, 5,8,13…

Premier phénomène intéressant, Kepler a démontré que le rapport entre chaque nombre de la suite et son précédent se rapproche inexorablement du nombre d’or au fur et à mesure de la progression de la suite. Et si l’on trace sur un graphique l’écart entre ce rapport et le nombre d’or, la courbe obtenue ressemble à un battement de cœur sur un ECG.

Pour aller plus loin, il est même démontrable que chaque nombre de la suite est une équation faisant intervenir des puissances de Φ et Φ’.

Qu’est-ce que cela signifie donc, que le nombre d’or et son opposé soient des composants de la suite de Fibonacci ? Sinon que le nombre d’or est bien une composante du vivant.

Et cela se retrouve dans la nature. La répartition selon le nombre d’or des pétales d’un tournesol est la manière optimale de les disposer pour en maximiser la place et donc la captation du soleil. Le nombre d’or moyen de capter l’énergie ? il n’y a qu’un pas à franchir que je suis prêt à faire tel l’apprenti avançant vers le Naos.

Ce nombre mystique a fasciné les mathématiciens en commençant par les matematikoi pythagoriciens qui l’ont formalisé. Eux pour qui les solides platoniciens représentaient les planètes de notre système, pour qui le pentagone était une représentation de dieu. Ce qui donnera chez nous le pentagramme et l’étoile.

Les divers historiens et architectes ont aussi tenté de trouver le nombre d’or dans diverses œuvres, dont la grande pyramide. Les plus sceptiques vous diront que ce ne sont que des approximations. Personnellement, sur des oeuvres d’une telle envergure, un faible pourcentage de différence semble minime. L’idée reste présente. Une certaine esthétique, trouvable dans la nature a pu influencer tous les penseurs et constructeurs de l’histoire sans avoir à la formaliser, la standardiser. Car la nature elle-même ne se formalise pas, elle existe, elle expérimente jusqu’à trouver la manière la plus efficace, la plus pure de perdurer.

Comment expliquer que ce nombre d’or fasse tant parler ? Et pourquoi, au-delà de l’aspect pythagoricien, en parler en ce jour dans notre loge ? En quoi la F :.M :. devrait-elle s’intéresser à ce nombre ?

Ce principe vital, beau, fait parler de lui, il interroge, il m’interroge. Il lance des débats, tout le monde le connait, en a entendu parler une fois dans sa vie. Il rassemble. Et qu’est-ce qu’un objet abstrait rassembleur sinon un symbole ?

Oui, le nombre d’or est un symbole et se doit donc d’être étudié pour en tirer toute son énergie, nous porter dans l’égrégore de sa démonstration. Et c’est à vous, nos jeunes apprentis, que je parle avant tout. Le nombre d’or est la preuve que les symboles peuvent se trouver dans les recoins les plus ésotériques et reculés des mathématiques. Car je n’ai plus peur de le dire, les mathématiques sont une brique essentielle de mon temple, un outil qui me suit depuis mon enfance.

Pour montrer à quel point c’est un symbole unificateur, en ce jour le nombre d’or nous unit avec l’esprit de nos frères passés. Mon père, dont le nombre d’or a été un sujet d’études permanent, me donnait par amusement des cours de géométrie et de démonstration du nombre d’or. Il me parlait du nombre d’or appliqué à l’architecture.

La façade de la cathédrale de Chartres restera par ailleurs gravée en mon âme à tout jamais. La démonstration de l’existence de l’étoile à 5 branches et donc du pentagone dans sa construction fut un de mes premiers chocs ésotériques qui a constitué ma pierre brute.

Mais n’oublions pas un petit détail qui a son importance. Dans la résolution de l’équation donnant le nombre d’or j’ai parlé de deux possibilités. Φ et Φ’

Si Φ est le nombre d’or, un symbole, que devient donc Φ’, son opposé naturel ? Une diabole, un symbole séparateur, le nombre d’argent ?

La suite de Fibonnaci le montre, plus la vie avance, plus Φ est prépondérant face à Φ’. Plus l’harmonie gagne sur la disharmonie. Car telle est la vie, elle cherche un équilibre.

Le nombre d’or me fait donc réfléchir à la vie présente, mais aussi à la vie passée. Et comment il alimentera ma vie future désormais. Mais cette discussion ne pourra se poursuivre qu’en élevant l’intensité de nos colonnes et je mets donc fin ici à cette première partie.